Les sites : Protohistoire Les dépôts de cendres de Nalliers

Nalliers, Vendée, France

La bordure littorale de la Vendée et de la Saintonge regorge de gisements volumineux attribués à l'industrie du sel en raison de la présence de la plupart des ingrédients constitutifs des fours à sel (récipients, débris de fourneaux, ustensiles divers). Dénommés dépôts de cendres depuis le XIXe siècle, ces épandages de débris de terres cuites, de charbons de bois et de céramiques (barquettes), dont l'épaisseur peut atteindre 3 mètres, se répartissent par amas de 5 000 à 50 000 m3 sur le pourtour d'anciennes vasières maritimes anthropisées depuis (c'est-à-dire modifiées sous l'effet de l'action humaine), et marais poitevin et saintongeais.

Le principal élément constitutif des dépôts de cendres de Nalliers consiste en fragments de plaquettes d'argile cuites dont l'un des côtés porte la trace du tranchant d'un outil, l'autre ayant conservé au séchage les traces du passage répété de vers de vase.
 
Ces récipients, reconnus comme moules à sel, sont évalués par tamisage à 7 % du dépôt, soit environ 450 unités au mètre cube. Si l'on excepte les fragments de piliers de terre cuite, probables éléments de fourneaux, les seuls objets susceptibles d'avoir été utilisés pour rassembler les récipients (barquettes de 20 cm de long, 8 cm de large et 4,5 cm de haut) dans un système évaporatoire sont des boulettes de calage ayant conservé les traces adjacentes de plusieurs angles de récipients dans le dispositif de cuisson. On pense que les fragments de plaquettes d'argile pourraient correspondre au rebut d'un traitement sophistiqué de vases apprêtés puis cuits dans un feu vif dans le seul but de diluer par lessivage le sel qui s'y serait concentré.
 
C'est en extrapolant à partir des capacités de production des différents éléments constitutifs des « dépôts de cendres » que l'on estime la productivité des établissements salicoles pictons et santons. Après analyse des rebuts de leurs exploitations et comparaison de diverses sources ethnographiques, on aboutit à une fourchette de 150 à 1 000 kg de sel par mètre cube de dépôt ; cette estimation s'éloigne très sensiblement de l'idée que l'on se faisait jusqu'alors, celle d'une activité locale suffisant à peine à la consommation des producteurs.
 
Enfin, il n'est pas impossible que les vasières installées dans le but de produire des argiles salées soient en réalité des dispositifs évaporatoires saisonniers liés au mouvement des marées, ce qui amène à y voir une forme de prototype de marais salants (fouille : N. Rouzeau, 1982).