Un plateau, des hommes

Du Néolithique à l’époque moderne, les vestiges mis au jour par les archéologues racontent l’histoire du plateau de Saclay dans sa complexité. Ces vestiges font aujourd’hui partie d’un projet de recherche global intitulé « Dynamique d’occupation du plateau de Saclay du Néolithique à l’époque moderne. Bases de données et cartographies des sites archéologiques. »

Le Paléolithique et le Néolithique

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Fouille d'une concentration d'éclats en grès du Néolithique sur le site de La Troche.

L’occupation humaine sur le plateau de Saclay est apparue, à la lumière des recherches archéologiques, bien plus ancienne qu’on ne le pensait jusqu’alors. Les traces les plus anciennes remontent au Paléolithique, mais c'est surtout au Néolithique qu'elles deviennent plus précises.

Le Paléolithique s'identifie par la présence d’une industrie lithique variée, comprenant un outillage de silex retrouvé à l’état résiduel sur de nombreux sites du plateau, ce qui empêche de caractériser clairement des occupations ou un quelconque habitat. Ces vestiges, qui proviennent des phases de fouilles et de diagnostics, se rattachent le plus souvent à la période du Paléolithique supérieur.

Concernant le Néolithique, depuis le XIXe siècle, plus d’une douzaine d’indices de surface attribués à cette période ont été repérés sur le plateau de Saclay. La majorité de ces indices sont signalés par Jean Cattant dans les années 1970, mais il est aussi fait allusion aux prospections d’Eschenbrenner en 1979 et à celles de Nicolas Prudhomme entre 1950 et 1970. Les découvertes se concentrent à l’ouest de l’École Polytechnique, sur une surface d’environ 160 ha.

 

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Vues d’un pic du Néolithique en silex, identifié sur le site de La Troche à Palaiseau.

Les diagnostics archéologiques récemment réalisés dans les communes de Palaiseau et de Saclay ont également permis de corroborer la fréquentation du plateau au Néolithique. La fouille d’une ferme gauloise sur le campus de l’École de Polytechnique (ENSTA) a permis de découvrir des artefacts du Néolithique (hache polie, lames, éclats…). Toutefois, aucun site structuré n’a été trouvé avant 2010. Les deux diagnostics réalisés pendant l’été de cette année ont permis la mise en évidence d’une occupation structurée du Néolithique récent au lieu-dit Les Marnières et d’une autre, du Chasséen, au lieu-dit La Troche.

Enfin, la fouille de 2012 située au niveau de la Zac du quartier de l’École Polytechnique, La Troche - secteur 1, a permis de découvrir sur plus de 2 ha une occupation du Néolithique moyen II (vers la fin du IVe millénaire avant notre ère). Les archéologues ont découvert sur ce site des objets à usage domestique qui se concentraient en petits secteurs distincts et étaient associés à des fours ou à des amas de pierres intensément brûlées. Il s’agissait de poteries (plat à pain, vaisselle de service, pot à cuire), d’outils en silex et en grès (couteaux, grattoirs pour le travail des peaux, haches polies pour l’abattage des arbres), de meules et de pics.

L’agriculture se développe alors en Europe depuis plus d’un millénaire, avec pour conséquence une explosion démographique. Les paysans doivent s’adapter à leurs nouvelles conditions de vie et s’organisent.

L’âge du Fer

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D’un bâtiment de l’âge du Fer, il ne reste généralement que l’empreinte au sol de la charpente en bois. Site des Trois Mares, Palaiseau.

Les vestiges de l’âge du Fer (entre 800 et 50 avant notre ère) sont essentiellement représentés sur le plateau par des « structures en creux », c’est-à-dire creusées dans le sol, comme des fosses d’extraction ou dépotoirs, des fours, des empreintes laissées par l’ossature (poteaux porteurs) des bâtiments sur charpente de bois, des celliers, des fossés… Ces différentes structures contenaient les témoins de la vie et des activités quotidiennes : céramique, restes alimentaires végétaux et animaux, objets de parure, outils… qui y ont été perdus, jetés ou déposés. Ce mobilier a permis non seulement de dater les périodes d’occupation des sites, mais aussi d’en reconnaître le statut.

Les fouilles des sites de l’ENSTA, des Trois Mares (Palaiseau), de l’Orme-des-Merisiers (Saint-Aubin) et du Val-d’Albian (Saclay), notamment, ont fait apparaître que le plateau de Saclay a été mis en valeur à grande échelle dès le début du IIe siècle avant notre ère : on y trouve alors la trace de nombreux domaines agricoles distants d’environ 500 m et de sites aristocratiques gaulois (au nord et au sud). La mise en évidence d’une large trame d’habitats structurés sur le plateau à l’époque celtique est l’une des principales informations tirées des fouilles récentes.

L’Antiquité

Après la conquête romaine de la Gaule, c’est au tour de grands domaines agricoles, les villae, de s’implanter à l’emplacement des sites aristocratiques gaulois, principalement sur les rebords du plateau. Néanmoins, au lieu de voir apparaitre de manière abrupte ces nouveaux ensembles dès 50 avant notre ère, on observe de nombreux sites gaulois perdurer. En effet, entre la fin de l’âge du Fer et le tout début de l’Antiquité, des sites continuent à se développer et d’importantes modifications des espaces sont perceptibles.

Les caractères culturels gaulois perdurent et, comme cela a pu être remarqué sur plusieurs sites, les occupations ne semblent pas être marquées par un phénomène de romanisation abrupte. Ce n’est, dans la plupart des cas, qu’à partir du milieu du Ier siècle de notre ère que l’on observe une profonde modification des espaces et de l’architecture. Une architecture maçonnée émerge en lieu et place des principaux bâtiments sur charpente de bois, bien que l’on puisse suggérer que certains continuent à exister. La culture et l’élevage s’intensifient grâce à l’optimisation des techniques de drainage préexistantes. Les domaines gallo-romains ont produit avoine, orge vêtue, blé, seigle et lentilles.

Les fouilles des sites de la Troche et des Trois Mares (Palaiseau) ont permis de mettre en lumière différents types et formes d’aménagements de ces nouveaux grands domaines présents sur le plateau.

Le Moyen Âge et l’époque moderne

Les vestiges du Moyen Âge (Ve-XVe siècle) sont moins documentés, mais deviennent progressivement de plus en plus nombreux, particulièrement dans la partie ouest du site du Synchrotron Soleil, avec la découverte d’un habitat du XIe-XIIe siècle à Saint-Aubin, dont le village médiéval s’organisait autour d’un château et d’une commanderie, ou encore à Palaiseau, où de vastes établissements ont été mis au jour récemment. Les premiers hameaux, à l’origine des fermes et villages actuels, se mettent également en place au Moyen Âge. Le cœur du plateau est voué à l’agriculture et à l’élevage.

À l’époque moderne, de nombreuses fermes sont construites à l’emplacement même d’occupations plus anciennes, un vaste réseau d’étangs et de rigoles est mis en place ; une ancienne carrière de marne, une autre de grès et un vaste réseau de drainage ont été révélés par les fouilles. Le maraîchage devient une activité prédominante aux XIXe et XXe siècles.