Sornettes

Idée reçue

« La population se réfugiait sur les hauteurs »

Longtemps les sommets des collines escarpées ont été considérés comme des sites-refuges. On imaginait que, pendant les épisodes d’insécurité, la population courait s’y abriter derrière des remparts de terre ou de pierre. Une fois le danger écarté, tous redescendaient dans la plaine et reprenaient leurs occupations.

Mais les fouilles récentes menées sur ce que les archéologues nomment des « sites de hauteur » ont totalement remis en cause cette interprétation. Il s’avère que la plupart des constructions qu’on y découvre ont été conçues pour durer : remparts maçonnés, bâtiments d’habitation, citernes et parfois même églises funéraires. Loin d’être discrets, tous ces aménagements étaient au contraire destinés à être vus de très loin.

Ces lieux de séjour permanent – et non pas occasionnel – dominaient souvent d’importantes voies de circulation. Pour bon nombre d’entre eux, les objets du quotidien qui y ont été retrouvés traduisent un niveau de vie élevé. La vaisselle en céramique, les verres et les divers récipients en pierre tendre proviennent de contrées lointaines. Les pièces de monnaies sont nombreuses et les vestiges d’activités artisanales témoignent que des forgerons et des verriers ont exercé sur ces sites de hauteur.

Il semblerait au bout du compte que ces habitats fortifiés perchés, loin de refléter la peur, affirment en fait la position dominante de leurs occupants. Grands domaines appartenant à l’aristocratie ou petites villes organisées sur plusieurs hectares, ce sont des lieux de pouvoir, qui bénéficient d’une situation bien visible dans le paysage. Selon leur importance stratégique, certains peuvent être dotés d’une tour de surveillance ou abriter une garnison militaire chargée de sécuriser le territoire. D’autres jouent un rôle de premier plan dans la christianisation des campagnes, à l’exemple du Mont Châtel dans l’Ain, qui affiche la puissance de l’Église par la présence de deux édifices religieux.